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Centro Bíblico San Pablo

SOBICAIN / Centro Bíblico San Pablo

Les révoltes juives

En moins de 10 ans, Auguste avait fait passer le monde romain de la République à l’Empire. L’ensemble du bassin méditerranéen et de nombreux territoires plus éloignés des côtes se trouvaient désormais soumis à l’autorité de Rome; la Palestine n’y échappait pas plus que les autres.

La Communauté juive avait vu ses privilèges en matière religieuse confirmés par César: Rome garantissait aux Juifs la liberté de culte dans le Temple de Jérusalem; elle étendait également cette tolérance à la liturgie synagogale pour toute la Diaspora. Les clivages s’étaient donc accentués entre les Juifs qui, comme les Pharisiens ou les Esséniens, ne demandaient que la liberté de culte — ce que Rome leur octroyait — et ceux qui n’avaient cessé de revendiquer également l’indépendance politique.

Les affrontements entre une population qui supportait de plus en plus mal les agissements maladroits ou vexatoires des représentants de Rome, et l’administration impériale, conduisirent à trois révoltes juives en moins de soixante-dix ans, à des représailles sauvages et à une dispersion sans précédent de la communauté juive.

LA TENSION MONTE

Vestigios de un muelle del puerto de Cesarea marítimaDurant son court règne, Caligula avait donné l’ordre d’ériger sa statue dans le temple de Jérusalem en représailles contre les Juifs qui avaient détruit à Jamnia un autel élevé en son honneur. Le légat eut la sagesse de faire traîner l’exécution de l’ordre impérial pendant qu’Agrippa, à Rome, usait de toutes ses relations pour faire rapporter cette ordonnance. Caligula fut assassiné au bon moment pour le légat qu’on avait sommé de se suicider pour insubordination, et la paix sembla revenue. Elle se prolongea sous le gouvernement de deux procurateurs successifs. Mais sous leur successeur Cumanus, à deux reprises l’arrogance d’un soldat romain provoqua émeute, répression brutale et démarche auprès du procurateur qui céda finalement aux instances des Juifs.

Un nouvel incident s’étant produit entre Samaritains et Juifs, Cumanus cette fois refusa de satisfaire à la demande de ces derniers; deux meneurs entraînèrent alors les foules en Samarie, massacrant et mettant le feu les villages. Les responsables juifs parvinrent à grand-peine à calmer les séditieux, mais les Samaritains portèrent plainte auprès du légat de Syrie. Celui-ci renvoya les plaignants à Rome où l’intercession d’Agrippa auprès de Claude, qui l’avait en amitié, retourna encore la situation en faveur des Juifs. Cumanus fut exilé et remplacé par Félix, connu pour son arbitraire et son inconduite notoire. C’est dans ces jours-là que mourut Claude, laissant l’empire à son fils Néron, né de son mariage avec Agrippine.

Dans Jérusalem livrée aux mains des factieux, les meurtres succédaient aux meurtres, la répression impitoyable des procurateurs, loin de calmer les esprits, exacerbait la vindicte des zélotes. Une émeute éclata à Césarée, dans la ville même où siégeait Félix. Son successeur Festus — celui que mentionnent les Actes des Apôtres, à propos du procès de Paul à Césarée — mit alors tout en œuvre pour arrêter le banditisme et la violence; mais avec les procurateurs corrompus qui le remplacèrent, la situation ne fit qu’empirer.

LA”PREMIÈRE RÉVOLTE”

Une bagarre entre Grecs et Juifs autour d’une synagogue mit le feu aux poudres. Le conflit s’étendit rapidement aux villes et à Jérusalem: en novembre 66, le pays soulevé comptait plus de 50 000 combattants. Cestius Gallus, légat de Syrie, parti d’Antioche, vient reprendre Césarée qu’il met à sac et dépêche en Galilée la 12 ème légion. Bientôt, le calme semble revenu dans le nord du pays, les Romains descendent sur Jérusalem qu’ils investissent. Mal informé, Cestius lève le siège, les Juifs en profitent pour se jeter sur l’ennemi en retraite et le mettre en pièces. L’empereur Néron réagit immédiatement et dépêche Vespasien,”ce guerrier infatigable” dont parle Tacite. Avec la 15 ème légion que Vespasien conduit personnellement, les deux légions que son fils Titus lui amène d’Égypte et la 12 ème qui est déjà sur place, le général romain dispose désormais de près de 60 000 hommes.

Vespasien fait successivement le siège de Jotapata, de Tibériade, de Gamla: à la fin de la saison, il maîtrise la Galilée. Au printemps suivant, il nettoie les bords du Jourdain, prend Jéricho et domine la majeure partie de la Judée. Les légions s’installent à Emmaüs.

VESPASIEN, EMPEREUR

Mais durant ce temps, à Rome, Néron a dressé tout le monde contre lui, les généraux se soulèvent et Néron se suicide pour échapper au supplice. La mort de l’empereur donne le signal d’un désordre général: c’est l’anarchie militaire et le retour aux guerres civiles. Finalement, les provinces d’Orient imposent leur loi et Vespasien est proclamé empereur. Ses troupes peuvent désormais le précéder à Rome pour préparer son arrivée, mais avant de s’embarquer il remet à son fils Titus le soin d’écraser définitivement la révolte juive: tâche d’autant plus urgente que les troubles récents ont laissé aux insurgés le temps de se ressaisir.

LA PRISE DE JÉRUSALEM


Le nouveau général en chef vient établir son camp à Guibéa, à 5 km de Jérusalem; il dispose d’une armée formidable, mais la ville est difficile à prendre et les défenseurs sont résolus. Malheureusement pour les insurgés, l’entente ne règne guère entre eux. Fatigués du despotisme de Jean de Gischala qui occupe Jérusalem depuis 67, les habitants accueillent avec joie un chef de bande, Simon bar Giora. Jean et ses zélotes se réfugient alors dans le quartier du Temple. On se pille entre Juifs, on s’entre-tue; trahisons, incendies… Après l’échec d’une attaque en force, Titus investit la ville. À la fin mai 70, le mur nord-ouest de l’enceinte cède; le terrain est conquis jusqu’au second mur qui cède à son tour. La forteresse Antonia est finalement enlevée en juillet et le 29 (ce même mois d’Ab, qui avait été celui de la prise de Jérusalem par Nabuchodonosor) le Temple est pris d’assaut et incendié. En septembre les derniers insurgés, décimés par une horrible famine, sont boutés hors de la ville haute où ils se sont regroupés: c’est la ruée finale. Jérusalem est en ruine.

LA FIN DE LA RÉVOLTE

Balas de las catapultas romanas que sirvieron para la toma del Herodión

Balles des catapultes romaines qui ont servi à capturer Hérodion

Ceux qui ont échappé à la mort vont rejoindre sur les marchés d’esclaves leurs compatriotes tombés captifs lors des combats de Galilée ou de Judée. Quelques groupes de zélotes retranchés dans les anciennes forteresses d’Hérode résistent encore et poursuivent une guerre de harcèlement. L’occupant décide de réduire ces noyaux de résistance: l’Hérodium et Machéronte sont enlevées les premières, et finalement Massada, après un siège de six mois; on est au printemps 73.

Empereur, Vespasien fit de la Palestine une province impériale qui prit le nom de Judea . Le Temple était en ruine, et l’impôt du Temple était versé maintenant au trésor de Jupiter Capitolin, mais le Judaïsme conservait son statut de religion reconnue.

Avec la perte de l’indépendance politique et la destruction du Temple la composition du Sanhédrin se transforma rapidement au profit des pharisiens Docteurs de la Loi qui se regroupèrent à Jamnia autour de Johannan ben Zakkaï. Très vite le Sanhédrin s’imposa en Palestine et dans la Diaspora comme l’autorité religieuse du Judaïsme: son président fut honoré du titre de”Prince”, Ha Nasi.

AGITATION SOUS TRAJAN

On comprend que Vespasien et son fils Titus aient eu peu de sympathie pour les Juifs. Quant au troisième de la dynastie, Domitien, son caractère tyrannique ne le disposait guère à respecter une religion qui s’affirmait par sa différence; aussi, lors de la grande persécution de 95 contre les Chrétiens, de nombreux Juifs furent également mis à mort et parmi eux, même des membres de la famille impériale convertis au Judaïsme.

Trajan accéda au pouvoir en 98. Rêvant de renouveler les exploits d’Alexandre en Orient, il décida d’abattre l’ennemi parthe. En 114 il envahit l’Arménie, puis il mène campagne en Mésopotamie et entraîne ses légions jusqu’aux rives du Golfe Persique. C’est alors que les Parthes contre-attaquent, et Trajan doit abandonner l’Assyrie et la basse Mésopotamie.

Les campagnes de Trajan vidaient les caisses de l’état: l’empereur augmenta les impôts. Les communautés juives de l’empire supportaient mal une pression fiscale sans cesse croissante et bientôt, en Cyrénaïque, en Égypte et à Chypre se dessinèrent des mouvements de révolte auxquels vinrent se joindre les riches communautés de Mésopotamie. Il n’est pas impossible que ce mouvement ait gagné, au moins partiellement, la Judée

BAR KOCHBA

Lorsqu’en 117 Trajan meurt subitement à Sélinonte en Cilicie, l’agitation des Communautés juives semble apaisée. Hadrien, qui vient d’accéder au pouvoir, visite Jérusalem en 130 et la trouve à peu près dans l’état où l’a laissée la première révolte et son anéantissement par Rome. Il décide alors d’en faire une ville nouvelle, Ælia Capitolina, où l’on construira sur les lieux du Temple un sanctuaire en l’honneur de Jupiter Capitolin. Il semble par ailleurs que la circoncision, assimilée par les Romains à une castration, ait été interdite dans le même temps. Toujours est-il qu’en 132, dès que l’empereur a quitté l’Orient, un certain Simon Kosiba, surnommé Bar Kochba,”le Fils de l’Etoile”, prend la tête de l’insurrection.

Reconnu comme Messie par l’un des plus illustres rabbins de l’époque, Rabbi Aquiba, et soutenu par le prêtre Eléazar, Simon étend son mouvement à tout le pays. Surpris, les Romains se replient derrière les frontières, laissant le champ libre aux révoltés. Jérusalem est libérée, on frappe monnaie, on rétablit probablement le culte; mais tout cela n’a qu’un temps. Les légions contre-attaquent et le soulèvement est écrasé plus terriblement encore qu’aux jours de Titus. Au début de 134 Jérusalem tombe de nouveau sous les coups des Romains. Quelques noyaux de résistants cherchent refuge dans les grottes creusées au flanc des oueds qui descendent du désert de Juda vers la Mer Morte. Les Romains ne tardent pas à les déloger et à les massacrer; Bar Kochba meurt dans un dernier combat, et Rome reprend le pays en main, effaçant même le souvenir du passé: Judea devient Palestina.

LES JUIFS S'ORGANISENT

Cafarnaún – La sinagoga reconstruida después del sismo del año 419 de nuestra era

Capharnaüm – La synagogue reconstruite après le tremblement de terre de 419 après JC

La population juive de Palestine n’est plus que l’ombre d’elle-même: le nombre des victimes est considérable, plus encore celui des captifs vendus comme esclaves. C’est pourtant ce”petit reste” qui accomplira le travail considérable ébauché à Jamnia entre les deux révoltes et poursuivi sans relâche dans les écoles rabbiniques en plusieurs villes de Palestine. Les Synagogues connaissent un véritable essor, tout particulièrement en Galilée où réside désormais le Sanhédrin.

L’empereur Antonin le Pieux (138-161) est un homme droit et consciencieux; ses contemporains ne tarissent pas d’éloges sur sa simplicité de mœurs et son égalité de caractère. Respectueux de la diversité de ses sujets, il accorde de nouveau aux Juifs le droit de pratiquer la circoncision, mais uniquement sur des sujets nés de parents juifs. Les faveurs de Rome ne sont pas désintéressées: le danger parthe est toujours là sur la frontière orientale de l’empire; les communautés juives de Mésopotamie sont puissantes et l’on peut toujours craindre qu’ils ne prennent le parti de l’ennemi. Rome n’hésite donc pas à renforcer les pouvoirs du Sanhédrin, qui confère à son président le titre de Patriarche des Juifs.

CHRÉTIENS EN PALESTINE

El muro sur de la iglesia sinagogal del Cenáculo, en la colina de Sión en Jerusalén

Le mur sud de l’église de la synagogue du Cénacle, sur la colline de Sion à Jérusalem

Aux premières heures, la Communauté chrétienne de Jérusalem était composée de Juifs de Palestine; formés à l’école des prophètes, nourris des paroles des Prophètes, et tout particulièrement des textes d’Isaïe sur le Serviteur de Yahvé, ils ont reconnu en Jésus de Nazareth le Messie annoncé à leurs pères. Celui dont on parle dans la Loi de Moïse et dans les Prophètes, nous l´avons trouvé; c´est Jésus, fils de Joseph, de Nazareth, comme le dira Philippe à Nathanaël (Jn 1,45).

Pour ces”Chrétiens de la Circoncision” — comme on les appelle souvent pour les distinguer des Chrétiens d’origine païenne — la Loi n’est pas abrogée mais transfigurée. Ils ne négligent rien des observances prescrites par la Thora, mais leur foi au Christ les rend suspects aux yeux des autres Juifs, et les conflits sont alors fréquents. Il n’est pas sans intérêt d’ailleurs de constater que lors de la première révolte juive, les Judéo-Chrétiens de Judée chercheront refuge en Samarie, puis bientôt à Pella en Transjordanie (Mc 13,14), se tenant ainsi à l’écart des hostilités déclenchées par les Juifs contre Rome.

Mais les deux révoltes juives n’ont fait qu’accroître la diversité de la population en Palestine: Grecs, Syriens et gens venus de tous les pays d’Orient y côtoient les Juifs qui ont survécu aux massacres et aux exils. Les Judéo-chrétiens se voient donc pris entre les Juifs qui se défient d’eux et les Chrétiens issus des autres peuples. Cette situation favorise l’éclatement du groupe.

Les uns reconnaissent en Jésus de Nazareth le Messie Fils de Dieu fait homme, tandis que d’autres se bornent à confesser son caractère messianique: entre ces deux il y a bien des variantes. Dès le milieu du 2 ème siècle, Hégésippe, un chroniqueur de l’Église de Palestine, dénombre une douzaine de sectes judéo-chrétiennes, sans plus de liens désormais avec la grande Église où les fidèles d’origine païenne sont de très loin les plus nombreux. Ces petites communautés privées de tout soutien et divisées s’étiolent. Aussi, lorsqu’au Concile de Nicée, en 325, on recense les évêques venus représenter les communautés de Palestine on remarque que pas un d’entre eux ne porte un nom juif.

Avant de disparaître, les communautés judéo-chrétiennes laisseront une littérature abondante. Ces œuvres assez inégales, parmi lesquelles on peut mentionner l’Évangile selon les Hébreux, l’Évangile de Pierre, l’Histoire de la Dormition de la Sainte Mère de Dieu et l’Histoire du Charpentier Joseph, n’ont pas été admises par l’Église dans le Canon des Écritures.

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